L’une des considérations les plus essentielles à la réalisation d’un événement en téléprésence est certainement l’infrastructure réseau des espaces exploités. Plusieurs facteurs sont susceptibles d’affecter la qualité des transmissions audiovisuelles, dont : la bande passante disponible – soit le débit binaire maximal des flux entrants et sortants (téléchargement et téléversement); la quantité et la qualité des flux audio et vidéo devant transiter entre chaque lieu impliqué, selon les besoins artistiques ou logistiques du projet; le type de connexion (filaire, dédiée ou partagée) au réseau local (LAN) et étendu (WAN); la qualité, le nombre et l’emplacement de ces connexions dans les espaces de production, etc.
Pour assurer une transmission des flux audiovisuels fiable et stable, il est fortement recommandé d’employer une connexion filaire de type Gigabit Ethernet (GbE). Autrement, il est préférable de placer la régie de téléprésence et tout autre appareil connecté à proximité du routeur Wi-Fi, afin d’obtenir une connexion internet optimale.
De plus, il est tout aussi recommandé d’avoir une connexion internet dédiée, c’est-à-dire séparée du reste du réseau local du lieu de production. Une telle configuration est nettement plus simple à gérer puisqu’elle limite les interdépendances avec le réseau et les autres systèmes connectés du lieu, susceptibles d’affecter la bande passante disponible et la qualité des transmissions.
Idéalement, tous les appareils connectés d’un événement devraient être sur un seul et même sous-réseau. Cela permettrait notamment d’utiliser des protocoles de transmission locaux, plus directs et sans compression de données, tels que le NDI ou l’OSC, par exemple. Pour ce faire, il faut en faire la demande à la personne responsable de l’administration réseau ou de la technique informatique de l’endroit.
Bien que chaque responsable de salle devrait être en mesure de fournir toute information relative à l’infrastructure réseau et à la connexion internet de son espace, il est tout de même important d’effectuer un test de vitesse (speedtest.net) pour connaître les débits entrant et sortant, ainsi que la latence de la connexion internet momentanée.
Il est recommandé d’effectuer ce type de test régulièrement, habituellement avant chaque période de test, d’essai technique, de répétition ou de présentation effectuées dans l’espace. Le fait de connaître la bande passante momentanément disponible permet d’anticiper certains problèmes et d’y remédier avant de commencer toute transmission internet.
Celle-ci peut varier selon les besoins de l’événement, soit la quantité de flux à transmettre, leur qualité et la stratégie de transmission adoptée. Tout d’abord, afin de garantir la qualité des flux audio et vidéo tout au long de leur transmission, il est recommandé de maintenir le débit total de la transmission à un niveau idéalement inférieur à environ 10 Mbps de la limite théorique de ladite bande passante.
En assumant qu’un événement en téléprésence vise à transmettre et recevoir minimalement un flux vidéo HD compressé (H.264) – ayant une résolution de 1920x1080p et un débit de 5 Mbps – et un flux audio stéréophonique (2 canaux) – avec un débit d’environ 1,5 Mbps par canal, soit 3 Mbps au total --, un débit de près de 20 Mbps dans chaque direction – en téléversement comme en téléchargement – serait recommandé, en considérant qu’une marge de sécurité raisonnable (~13 Mbps) serait maintenue (5 Mbps + 3 Mbps = 7 Mbps).
Dans l’optique d’un événement en téléprésence dont les besoins dépassent ceux d’un usage domestique – voire nécessitent l’envoi de plus d’un flux audio et vidéo par lieu – il est fortement recommandé d’avoir le double (40 Mbps), voire le triple (60 Mbps) de la bande passante minimale (20 Mbps), et ce, dans chaque direction, ce qui permettrait alors de doubler ou tripler le nombre de flux pouvant être reçus ou transmis.
Par exemple, si un lieu souhaite transmettre trois (3) flux vidéo HD (1080p) indépendants – compressés (H.264) à un débit de 5 Mbps chacun – et trois (3) flux audio – à un débit d’environ 1,5 Mbps par canal – vers deux autres destinations, il faudrait alors multiplier l’ensemble de ces débits par deux : 2 x ((3 x 5) + (3 x 1,5)) = 2 x 19,5 = 39 Mbps. En ajoutant à ce total un 10 Mbps de sûreté, cela donnerait un total de 49 Mbps (~50 Mbps).
Les tableaux suivants illustrent un autre exemple de transmission de type multi-unicast entre trois lieux :
Le lieu A envoie 1 flux vidéo @ 3 Mbps et 2 flux audio @ 1,5 Mbps chacun vers 2 autres lieux (B et C) : son débit total en téléversement = 6 Mbps x 2 destinations = 12 Mbps / 20.
Types de flux | Nb. de flux | Débit par flux | Nb. de destinations | Débits totaux |
---|---|---|---|---|
Vidéo (H.264) | 1 | 3 Mbps | 2 | 6 Mbps |
Audio | 2 | 1,5 Mbps | 2 | 6 Mbps |
Le lieu B envoi 3 flux vidéo @ 5 Mbps et 3 flux audio @ 1,5 Mbps, vers 2 autres lieux (A et C) : son débit total en téléversement = 19,5 Mbps x 2 destinations = 39 Mbps / 50.
Types de flux | Nb. de flux | Débit par flux | Nb. de destinations | Débits totaux |
---|---|---|---|---|
Vidéo (H.264) | 3 | 5 Mbps | 2 | 30 Mbps |
Audio | 3 | 1,5 Mbps | 2 | 9 Mbps |
Le lieu C envoi 2 flux vidéo @ 5 Mbps et 2 flux audio @ 1,5 Mbps chacun vers 2 autres lieux (A et B) : son débit total en téléversement = 13 Mbps x 2 destinations = 26 Mbps / 30.
Types de flux | Nb. de flux | Débit par flux | Nb. de destinations | Débits totaux |
---|---|---|---|---|
Vidéo (H.264) | 2 | 5 Mbps | 2 | 20 Mbps |
Audio | 2 | 1,5 Mbps | 2 | 6 Mbps |
En tenant compte du débit d’envoi et de la bandes passante maximale en téléchargement respective à chaque lieu, la bande passante restante peut être calculée pour chacun d’eux :
Le tableau suivant résume les valeurs résultantes :
Lieux | A ↑ | A ↓ | B ↑ | B ↓ | C ↑ | C ↓ |
---|---|---|---|---|---|---|
Débits totaux (Mbps) | 12 | 32,5 | 39 | 19 | 26 | 25,5 |
BP max. ↑ (Mbps) | 20 | 100 | 50 | 50 | 30 | 50 |
BP restante ↑ (Mbps) | 8 | 67,5 | 11 | 31 | 4 | 24,5 |
Dans cet exemple, on constate que le lieu C a une bande passante restante bien en deçà de la marge de sécurité sur le plan de l’envoi.
Pour éliminer ce risque, le lieu C pourrait alors diminuer son débit d’envoi de chaque vidéo à 3 Mbps – libérant ainsi 8 Mbps en téléversement – pour s’accorder une plus grande marge de sûreté.
Lieux | A ↑ | A ↓ | B ↑ | B ↓ | C ↑ | C ↓ |
---|---|---|---|---|---|---|
Débits totaux (Mbps) | 12 | 28,5 | 39 | 15 | 18 | 25,5 |
BP max. ↑ (Mbps) | 20 | 100 | 50 | 50 | 30 | 50 |
BP restante ↑ (Mbps) | 8 | 71,5 | 11 | 35 | 12 | 24,5 |
En tenant compte du débit d’envoi et de la bandes passante maximale en téléchargement respective à chaque lieu, la bande passante restante peut être calculée pour chacun d’eux :- Si les lieux B et C envoient vers le lieu A à un débit de 19,5 et 13 Mbps respectivement, le débit entrant total du lieu A sera de 32,5 Mbps, sur un maximum disponible de 100 Mbps.- Si les lieux A et C envoient vers le lieu B à un débit de 6 et 13 Mbps respectivement, le débit entrant du lieu B sera de 19 Mbps, sur un maximum disponible de 50 Mbps.- Si les lieux A et B envoient vers le lieu C à un débit de 6 et 19,5 Mbps respectivement, le débit entrant du lieu C sera de 25,5 Mbps, sur un maximum disponible de 50 Mbps.Le tableau suivant résume les valeurs résultantes :
Lieux | A ↑ | A ↓ | B ↑ | B ↓ | C ↑ | C ↓ |
---|---|---|---|---|---|---|
Débits totaux (Mbps) | 12 | 32,5 | 39 | 19 | 26 | 25,5 |
BP max. ↑ (Mbps) | 20 | 100 | 50 | 50 | 30 | 50 |
BP restante ↑ (Mbps) | 8 | 67,5 | 11 | 31 | 4 | 24,5 |
Dans cet exemple, on constate que le lieu C a une bande passante restante bien en deçà de la marge de sécurité sur le plan de l’envoi. Pour éliminer ce risque, le lieu C pourrait alors diminuer son débit d’envoi de chaque vidéo à 3 Mbps – libérant ainsi 8 Mbps en téléversement – pour s’accorder une plus grande marge de sûreté.
Lieux | A ↑ | A ↓ | B ↑ | B ↓ | C ↑ | C ↓ |
---|---|---|---|---|---|---|
Débits totaux (Mbps) | 12 | 28,5 | 39 | 15 | 18 | 25,5 |
BP max. ↑ (Mbps) | 20 | 100 | 50 | 50 | 30 | 50 |
BP restante ↑ (Mbps) | 8 | 71,5 | 11 | 35 | 12 | 24,5 |
Latence totale observée (≤ 400 ms ou 0,4 s) :
Latence totale observée (≤ 400 ms ou 0,4 s) :
La latence est le délai entre le moment où une information est envoyée et que celle-ci est reçue à destination; c’est le temps nécessaire aux paquets de données pour passer de la source à la destination, notamment à travers un réseau.
Pour permettre une expérience interactive optimale – l’un des aspects essentiels de la téléprésence – la latence entre les lieux devrait idéalement être inférieure à 400 ms. En général, le réseau internet lui-même n’introduit que très peu de latence, souvent inférieur à 5 ms (ping). Sur un réseau local (GbE), ce délai peut même être inférieur à 1 ms. Mais lorsque des flux vidéo et audio sont transmis via Internet entre des lieux distants, le délai de transmission devient alors inévitablement plus long, variant d’une centaine de millisecondes jusqu’à plusieurs secondes, selon le ou les protocoles de transmission employés.
En téléprésence, la vidéo occupe facilement la plus grande part des données transmises. Et puisque les vidéo sont généralement traitées numériquement via un ordinateur – notamment pour l’encodage et le décodage logiciel – avant de pouvoir être transmises sur internet, ceci ajoute une certaine latence à celle, nettement plus faible, de la transmission internet. En somme, la latence totale, de bout-en-bout – soit le temps écoulé entre l’instant où l’information est captée ou générée à la source et qu’elle est diffusée à la destination – peut varier en fonction de différents facteurs.
Par convention, la latence d’une transmission vidéo de bout-en-bout inférieure à 100 ms est considérée comme « nulle » (Zero latency); elle est considérée « temps-réel » (Real-time latency) si inférieure à 1 seconde – typiquement entre 100 et 500 ms; « ultra-faible » (Ultra Low latency) si elle est inférieure à 5 secondes, mais supérieure à 1 seconde; et si elle est supérieure à 5 secondes, elle est alors considérée comme « faible », soit surtout applicable à des fins de diffusion (Low latency ou Broadcast latency). Le tableau suivant résume les transmissions typiques selon le protocole et la latence :
Type de latence | Temps de latence | Transmissions typiques | Protocoles typiques |
---|---|---|---|
Nulle | ≤ 100 ms | Diffusion locale | SDI, NDI |
Temps réel | 100 ≥ 500 ms | Visioconférence | RTP/RTSP (UDP) |
Ultra-faible | 1 ≥ 5 secondes | Webdiffusion | SRT |
Faible | ≥ 5 secondes | Webdiffusion | RTMP |
Dans les cas où l’interaction entre les lieux est à privilégier, une latence en temps-réel (< 1s) est évidemment requise. Par exemple, une application web de visioconférence, employant le RTP (UDP) comme protocole de transmission internet, peut présenter une latence de bout-en-bout inférieure ou égale à 400 ms, tandis qu’une diffusion audiovisuelle vers une plateforme web de réseau social (Socialcast), employant plutôt le RTMP, peut présenter une latence totale de près de 20 secondes.